Le printemps arabe, du doux rêve à l’interminable cauchemar

Une hirondelle ne fait pas le printemps. Chronologiquement, l’immolation, le 17 décembre 2010, du jeune vendeur ambulant, Mohammad Bouazizi, symbole de la révolution tunisienne, est considérée comme le déclencheur d’un mouvement de protestation qui va provoquer une onde de choc non seulement en Tunisie, mais dans tout le monde arabe. Toutefois, ce sont les centaines de milliers d’Égyptiens qui ont investi le centre-ville du Caire, le vendredi 25 janvier 2011, appelant au « changement du régime » qui vont marquer les consciences et montrer au monde que les choses bougent dans cette région. Ensuite, de Benghazi en Libye à Deraa en Syrie, en passant par Sanaa, Amman, ou Manama, les contestations populaires se sont succédé sans se ressembler.

En effet, cinq ans plus tard, le résultat de ce que l’on a appelé le printemps arabe diffère radicalement d’un pays à un autre. En Tunisie, le départ de Zine el-Abidine Ben Ali ouvre la voie à un changement de régime, inaugurant tant bien que mal une nouvelle ère, malgré la persistance des problèmes socio-économiques et des conflits politiques entre islamistes et laïcs.

En Libye, l’intervention militaire occidentale a permis de balayer Mouammar Kadhafi. Toutefois, le pays est désormais plongé dans un chaos inextricable, entre lutte politique interne et menace jihadiste, qui gangrènent un pays qui risque désormais l’éclatement.

Au Yémen, les manifestations populaires ont réussi à chasser du pouvoir Ali Abdallah Saleh. Mais cinq ans plus tard, le pays est déchiré par une guerre entre les rebelles chiites houthis, appuyés par l’Iran, et le nouveau pouvoir du président Hadi, soutenu par l’Arabie saoudite qui a déclenché l’opération « Tempête de la fermeté », entraînant une véritable guerre de procuration.

En Égypte, la démission du raïs Hosni Moubarak, sacrifié par l’armée, a permis l’arrivée au pouvoir de Mohammad Morsi, au cours des premières élections libres de l’histoire du pays. Le candidat des Frères musulmans a toutefois été destitué en 2013 par le maréchal Abdel-Fattah al-Sissi. Depuis, le nouveau pharaon d’Égypte a répété et amplifié le modèle conçu par ses prédécesseurs pour s’accaparer le pouvoir et faire taire toutes formes de contestation.

En Syrie, les protestations pacifiques qui ont éclaté au début de la révolte le 15 mars 2011 se sont transformées en une guerre civile féroce, le président Bachar el-Assad ayant réussi à rester au pouvoir grâce à l’appui inconditionnel des Iraniens, notamment via le Hezbollah libanais, et des Russes qui se sont investis militairement face aux rebelles appuyés par l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie. Entre-temps, un troisième acteur – et quel acteur… – est venu s’ajouter à la donne : l’organisation de l’État islamique, qui règne sur presque la moitié du territoire syrien.

À cela, il faut ajouter la révolte au Bahreïn, écrasée par l’Arabie saoudite, mais aussi les quelques manifestations en Algérie, au Maroc ou en Jordanie, qui ont été rapidement amadouées par une série de réformes économiques sans grande envergure. Ainsi, cinq ans plus tard, l’enthousiasme et les espoirs engendrés par les contestations populaires contre l’injustice sociale et la dictature semblent se transformer dans le meilleur des cas en désillusion totale, dans le pire en un vrai cauchemar.

Source:lorientlejour.com

commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Translate »
RSS
Follow by Email
YouTube
Telegram
WhatsApp