Inutiles, voire dangereux, les conseils beauté TikTok inquiètent les médecins

Aux Etats-Unis, certaines tendances vues sur TikTok inquiètent les médecins. Tirer sur son cuir chevelu, se percer la peau avec des micro-aiguilles… des « conseils beauté » qui ne sont pas sans danger.

Dormir avec une épaisse couche de Vaseline sur le visage pour l’hydrater, boire des tasses d’eau à la chlorophylle pour lutter contre les boutons disgracieux, se faire des micro trous dans les pommettes pour booster la production de collagène… Si ces idées peuvent sembler saugrenues, elles sont très populaires sur TikTok, le réseau social phare de la génération Z. Mais ces astuces beauté artisanales et peu onéreuses ne sont pas sans danger.

Aux Etats-Unis, des médecins s’inquiètent d’ailleurs de ce phénomène qui prend de l’ampleur chez les jeunes Américains, rapporte le New York Times. Un des médecins interrogés par le quotidien, le dermatologue Dendy Engelman, s’étonne : « C’est drôle parce que les patients sont souvent si timides dans notre bureau à l’idée d’essayer des traitements. Mais quand ils voient quelque chose fait sur Instagram par un influenceur de 18 ans, ils se disent « Bien sûr ! » »

DES « OUTILS MAISON » À L’ORIGINE DE COMPLICATIONS

Sur TikTok, le hashtag #microneedling cumule plus de 251 millions de vidéos et flirte avec le buzz depuis le printemps. Preuve de l’engouement de ses jeunes utilisateurs pour cette technique qui peut être douloureuse, puisque des dizaines de petites aiguilles percent les couches de l’épiderme et du derme, pour forcer la peau à cicatriser et donc produire du collagène. Cette intervention promet de redonner de l’éclat et de repulper la peau. « Le microneedling est une pratique qu’on utilise beaucoup en dermatologie esthétique mais à faire uniquement en cabinet, sur une peau totalement désinfectée et avec du matériel à usage unique », insiste Isabelle Gallay, médecin dermatologue spécialisée en chirurgie esthétique.

Il faut compter une dizaine d’euros pour s’offrir un roller de microneedling doté de 540 mini aiguilles sur Amazon, et sur la plateforme d’e-commerce Wish il suffit de 2€. C’est l’accessibilité à ces vidéos virales et à des produits peu onéreux qui incitent les jeunes internautes à imiter les conseils visionnés. « Comme ce sont des outils maison, il faut faire très attention, avoir une hygiène absolue et ne surtout pas les prêter car ces rollers font des trous dans la peau, autant de portes d’entrée pour les bactéries », souligne Isabelle Gallay, vice-présidente du Syndicat National de Dermatologie Vénérologie. Bien souvent, ces « outils maison » sont à l’origine de complications et peuvent occasionner des conséquences à long terme sur l’épiderme et le derme. En août dernier, Tilly Whitfield, une candidate australienne de télé-réalité, a été hospitalisée après s’être enfoncé dans les pommettes des aiguilles à coudre achetées sur eBay. Suite à cette acupuncture artisanale qui s’est infectée, la star a perdu temporairement l’usage d’un œil et a vu son visage défiguré par des croûtes rouges.

Des conseils DIY inutiles

Une autre astuce très populaire sur le réseau social, pour avoir une peau lisse, est l’eau à la chlorophylle. Cette routine beauté promet qu’ajouter plusieurs gouttes du pigment à son alimentation permet de purifier les pores, d’éliminer l’acné mais aussi d’améliorer son transit. Grande fan de jus verts, Reese Witherspoon, l’héroïne de « La Revanche d’une blonde », est par exemple aficionado d’eau agrémentée de gouttes de chlorophylle.

Sur TikTok, 157 millions de vidéos sont ainsi estampillées #chlorophyllwater (eau à la chlorophylle). Une méthode certes 100% « green beauty », et beaucoup moins dangereuse que le microneedling, mais ces gouttes sont-elles la panacée à nos problèmes de peau ? « Il n’y a pas d’étude qui prouve que sa consommation donne une peau lisse et assainie », explique le docteur Christophe Thibault, secrétaire général de la Fédération des médecins de France (FMF). Le généraliste rappelle : « on en mange déjà dans les légumes verts comme la salade ou les haricots. Lorsqu’elle arrive dans l’estomac, la chlorophylle va être détruite tout de suite, et si on en consomme beaucoup, on risque juste d’avoir une diarrhée », s’amuse le médecin. Au lieu de boire de larges quantités d’eau à la chlorophylle pour avoir une peau rebondie, la dermatologue Isabelle Gallay recommande de « mettre une bonne crème hydratante qui réfléchit les radiations lumineuses des écrans comme la lumière bleue et de prendre par voie orale des antioxydants qui protègent de la pollution ».

Avec ses 9,3 millions de vidéos TikTok, le « scalp popping » (ou craquement du cuir chevelu) se révèle moins viral mais un peu plus inquiétant. Cette technique d’origine mexicaine, prétend soulager les migraines et maux de têtes en se tirant les cheveux. Le concept est désarmant de simplicité et ne nécessite aucun matériel : il consiste à s’enrouler une mèche de cheveux autour du doigt, puis à tirer dessus assez fort afin de provoquer un craquement sonore. Sur le réseau social préféré des ado, Tony Youn, un chirurgien plasticien américain pédagogue alerte justement les jeunes internautes sur l’afflux sanguin et les risques d’hématome sur le crâne.

« Lorsque l’on tire sur le cuir chevelu, on le désolidarise du reste des tissus et des fascias », alerte le secrétaire général de la FMF. A l’image de son confrère outre-Atlantique, le médecin Christophe Thibault souligne la dangerosité de cette méthode. « Le scalp popping crée des anomalies de sensation, des picotements un peu bizarres, qui peuvent nous laisser penser que ça nous a soulagés. Mais il peut avoir des conséquences nerveuses sur tout le reste du corps. » Le généraliste rappelle aux « ados et jeunes adultes qui ont des problèmes de peau et qui ne sont pas bien avec leur apparence, de voir des professionnels, des médecins et des dermatologues. Vouloir se soigner avec des techniques vues sur les réseaux sociaux engendre des complications immédiates ou à long terme. »

Si aux Etats-Unis les médecins s’inquiètent des conséquences de ces tendances beauté non vérifiées sur l’application, Christophe Thibault relativise leur popularité en France : « ici, je n’ai pas l’impression qu’il y ait énormément d’adeptes de scalp popping et heureusement » Et de conclure : « il ne faut pas croire tout ce qu’on voit sur internet, ou ce que disent les gourous beauté sur les réseaux sociaux, ce ne sont pas des remèdes miracles aux problèmes de peaux, bien au contraire ». De quoi nous rendre beaucoup plus prudents avant de tester la future tendance beauté de TikTok.

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