Troisième journée de manifestations en Guinée :Le nombre de manifestants tués passe de 7 à 10 et 200 arrestations

Quelques commerces ont timidement rouvert à Matoto, l’une des plus grandes agglomérations de la capitale, mais les manifestations se poursuivaient dans d’autres quartiers comme Hamdallaye, Cosa, Koloma, Lambanyi et Kobaya, selon des témoins.

“Ces jeunes sont fous, nous on est fatigués, nous voulons qu’ils rentrent chez eux, mais impossible”, a déclaré une source policière.

Les huit responsables du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), qui rassemble des partis d’opposition, des syndicats et des membres de la société civile, ont été entendu par le tribunal de première instance de Dixinn, un quartier de Conakry, lors d’une audience tendue mercredi matin.

Le président du tribunal a ordonné la suspension des débats, à la demande du procureur, afin qu’il prépare son réquisitoire, a expliqué l’un des avocats de la défense, Mohamed Traoré.

Le procès doit reprendre vendredi avec le réquisitoire et les plaidoiries.

200 arrestations

Le FNDC milite depuis des mois contre un projet de révision de la Constitution, évoqué par le pouvoir, qui permettrait à Alpha Condé, 81 ans, de se présenter fin 2020 pour un troisième mandat. Leur nombre est actuellement limité à deux.

Le bilan des heurts depuis lundi est passé à 10 manifestants tués, a indiqué le FNDC, qui en avait compté sept mardi. Il fait également état de 70 blessés par balle et de près de 200 arrestations, dont la moitié à Conakry. “On continue d’assister à de nombreuses incursions des forces de l’ordre dans les domiciles des citoyens où des femmes ont été agressées physiquement et verbalement et leurs marmites de riz renversées”.

Le gouvernement assure que les forces de sécurité ne font pas usage d’armes à feu et a confirmé seulement la mort d’un habitant de Conakry et d’un gendarme. L’AFP a pu établir un bilan de sept tués chez les manifestants, selon des proches et des médecins.

Lors de l’audience, les prévenus ont dénoncé des traitements inhumains et dégradants au cours de leur garde à vue, notamment le fait d’avoir été confinés dans des cellules exigües ou d’avoir été mis à nu.

Les huit hommes sont jugés pour avoir tenu des propos de nature à troubler l’ordre public en appelant à manifester, selon l’accusation. Ils avaient été interpellés samedi au domicile du coordinateur du FNDC, l’ancien ministre Abdourahmane Sanoh, et encourent, selon leurs avocats, des peines de 3 à 5 ans de prison.

La défense a annoncé qu’elle plaiderait “non coupable”, l’accusation n’ayant pas la preuve selon elle qu’ils ont commis des “actes et manoeuvres” de nature à troubler l’ordre public en appelant à des manifestations pacifiques.

“Les innombrables intimidations du pouvoir doivent cesser, elles ne nous feront pas abandonner le combat pour la démocratie”, a déclaré mercredi le chef de l’opposition politique, Cellou Dalein Diallo, en exigeant l’abandon des poursuites.

Des procès similaires se sont ouverts dans le même temps dans d’autres villes du pays, selon des sources judiciaires et proches du FNDC.

‘Limites dépassées’

Ces tensions alarment l’ONU, inquiète d’une escalade dans ce pays pauvre malgré ses importantes ressources minières, à la stabilité incertaine, coutumier des protestations et des répressions extrêmement violentes.

Sans dévoiler explicitement ses intentions, M. Condé a lancé en septembre des consultations sur la Constitution. Il s’exprimera “le moment venu”, selon la présidence. Ses desseins ne font aucun doute pour ses adversaires, qui dénoncent les consultations comme une “mascarade”.

Le gouvernement affirme que la mobilisation est illégale, faute de déclaration officielle préalable. Il justifie l’intervention des forces de l’ordre et les multiples arrestations d’opposants par les atteintes à la sécurité publique.

“Il a suffi juste que le mot Constitution soit prononcé pour que certains partent dans toutes les interprétations”, a déclaré mardi le ministre de l’Administration du Territoire, le général Bouréma Condé.

Selon lui, le FNDC a “outrepassé les limites par des annonces graves en affirmant qu’aucun citoyen guinéen ne devait se déplacer et qu’aucun moyen de locomotion ne devait être en mouvement”.

En réalité, estiment les défenseurs des droits humains, la répression prolonge le durcissement du régime observé depuis des mois en même temps que se cristallisait l’idée d’un troisième mandat.

AFP

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