RDC : morts en série au sommet de l’Etat et rumeurs d’empoisonnement

Des morts en série dans l’entourage du président de la République démocratique du Congo (RDC), officiellement de la maladie Covid-19, alimentent des rumeurs d’empoisonnements au sommet de l’Etat à Kinshasa.

Ce climat déjà pesant s’est alourdi avec le décès soudain du juge en charge d’un procès anticorruption sans précédent. Ce procès doit reprendre mercredi avec, sur le banc des accusés, un homme fort de la vie politique congolaise, le directeur de cabinet et principal allié du chef de l’Etat, Vital Kamerhe.

Le président Félix Tshisekedi est muet depuis ses deux interventions télévisées les 18 et 24 mars pour instaurer “l‘état d’urgence sanitaire” face aux premiers cas de nouveau coronavirus en RDC.

Depuis, le Covid-19 a touché selon les derniers chiffres officiels 3.326 personnes et tué 72 patients, dont une bonne dizaine dans les cercles de la présidence et du gouvernement.

La maladie a d’abord touché fin mars la ministre de l’Economie Acacia Bandubola, qui a perdu une soeur et son frère, membre de son cabinet.

Depuis, plusieurs décès ont été signalés à la présidence: Jacques Ilunga, l’un des principaux négociateurs de l’accord de coalition avec le précédent président Joseph Kabila; l’oncle du président, Mgr Gérard Mulumba, responsable de la “Maison civile” (les affaires privées); Charles Kilosho, directeur adjoint de la communication présidentielle.

“Si je ne me trompe pas, nous avons enterré deux ou trois personnes cette semaine”, a encore déclaré vendredi soir le porte-parole du président, Tharcisse Kasongo Mwema Yamba Y’amba.

“Tous les services de la présidence sont mis en alerte”, a-t-il reconnu sur la chaîne d’Etat RTNC, qui l’a interrogé sur les rumeurs d’empoisonnement entourant ces décès en série.

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“Scientifiquement, il n’y a encore aucune preuve qui a été donnée pour dire qu’il y autre chose que le Covid-19 parmi les décès que l’on a déplorés à la présidence de la République”, a-t-il répondu.

“Je ne sais pas vous dire si c’est le Covid ou si c’est le poison”, a-t-il ajouté dimanche sur la radio privée Top Congo FM, relancé sur la même question.

Il a repris le même argument de l’absence de preuves scientifiques infirmant la thèse de la mort par Covid ou validant des décès par empoisonnement.

“Je ne sais pas si les autopsies ont été réalisées, je n’ai pas entendu parler d’autopsies”, a-t-il ajouté.

Dans ce climat délétère, l’opinion attend le résultat de l’autopsie du magistrat Raphaël Yanyi, mort dans la nuit de mardi à mercredi.

Le rapport d’autopsie attendu

Deux jours avant sa mort, visiblement en pleine forme, le magistrat âgé d’une cinquantaine d’année présidait avec professionnalisme et fermeté le procès de Vital Kamerhe et de deux autres accusés, jugés pour le détournement de quelque 50 millions de dollars de fonds publics.

Le juge est décédé moins de 48 heures plus tard, d’une crise cardiaque, d’après la police.

Le Parquet a annoncé l’ouverture d’une enquête et demandé une autopsie pour déterminer les “causes ou moyens” du décès. L’autopsie a été pratiquée vendredi, selon certains médias congolais.

“Aucun résultat n’est sorti”, a déclaré mardi à l’AFP Lambert Ombalakonde, porte-parole de la famille du défunt.

“Il faut patienter encore quelque jours”, a expliqué à l’AFP un magistrat du Parquet, indiquant que ce rapport n’est pas destiné au public.

En attendant, la famille a qualifié de “spéculations” les informations qui circulent sur les réseaux sociaux et même dans certains médias.

Dimanche soir, la radio onusienne Okapi a avancé que “le juge Raphaël Yanyi n’est pas décédé d’une mort naturelle. Un poison aurait été utilisé pour le tuer”. Ce média généralement fiable affirmait se baser sur le rapport d’autopsie et des sources judiciaires.

Le parti de Kamerhe se défend

Le parti de Vital Kamerhe, l’Union pour la Nation congolaise (UNC), a regretté les “attaques distillées sur les réseaux sociaux tendant à lui attribuer” les morts en série à la présidence. L’UNC a dénoncé un acte de “cybercriminalité”.

“Le parti dénonce également des critiques tendancieuses dirigées contre son président national (Vital Kamerhe) et ses avocats à la suite de la mort inopinée du juge Raphaël Yanyi”.

L’UNC a demandé d‘éclaircir “les morts inquiétantes à la présidence de la République et le décès inattendu du juge”, demandant pour celui-ci “l’implication d’un médecin légiste indépendant et international”.

Bien plus qu’un simple directeur de cabinet, Vital Kamerhe, 61 ans, est le principal allié du président dans son arrivée au pouvoir en janvier 2019.

Ancien président de l’Assemblée nationale, M. Kamerhe s’est désisté en novembre 2018 pour permettre à M. Tshisekedi d‘être candidat. Les deux hommes ont conclu un accord politique qui prévoyait que M. Kamerhe soit candidat à la prochaine élection en 2023.

AFP

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