Migrants : l’Italie passe à l’action pour limiter les arrivées

Navire d’une ONG allemande mis sous séquestre, patrouilleur italien dans les eaux libyennes : Rome tente concrètement de contrer l’arrivée de réfugiés au prix de tensions avec les humanitaires.

L’Italie a saisi mercredi le bateau d’une ONG allemande, engagée dans le sauvetage de migrants en Méditerranée, une première dans un pays qui s’efforce désormais de limiter coûte que coûte les arrivées de ceux fuyant la guerre ou la misère via la Libye. Sur plus de 111.000 migrants arrivés en Europe par la mer depuis le début de l’année, 95.000 ont accosté en Italie, selon l’Organisation internationale pour les migrants.

 

Dans le cadre d’une enquête démarrée en octobre 2016, le procureur de Trapani en Sicile, qui a ordonné la saisie «préventive» du «Iuventa», soupçonne l’équipage de ce bateau affrété par l’ONG allemande Jugend Rettet, d’avoir adopté «des comportements favorisant l’immigration illégale», des allégations que Titus Molkebur, le porte-parole de l’organisation allemande, a niées, selon «Die Zeit». Le navire a été bloqué mercredi à Lampedusa, une île au sud de la Sicile.

 

Le procureur Ambrogio Cartosio a expliqué que «des membres d’équipage du « Iuventa » sont soupçonnés d’avoir pris à bord, au moins à deux reprises, des migrants escortés par des trafiquants libyens et dont les vies n’étaient pas en danger». L’enquête laisse penser que la pratique était «fréquente», mais pour des motifs purement «humanitaires».

 

Un patrouilleur italien pour la première fois dans les eaux libyennes

 

Le même jour, le Parlement italien a donné son feu vert à l’envoi de navires militaires en Libye et un premier bateau, un patrouilleur, a fait son entrée dans l’après-midi dans les eaux territoriales libyennes. L’Italie n’a aucune intention de faire «un blocus naval», ce qui serait «un acte hostile», a affirmé le gouvernement italien, insistant sur une «demande de soutien et d’aide aux garde-côtes libyens», dans la lutte contre les trafiquants d’êtres humains.

 

L’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch estime néanmoins que le refoulement de migrants vers un pays où ils risquent d’être maltraités, comme c’est le cas en Libye, constitue une violation des droits humains.

 

Des partenaires européens sourds aux appels italiens

L’Italie, non exempte de réactions d’exaspération de sa population face à l’arrivée continue de migrants, a adopté depuis quelques mois un discours nettement plus ferme, en particulier en direction de ses partenaires européens peu enclins à partager le fardeau de l’accueil.

 

Elle s’efforce également, avec l’appui financier de l’UE, de renforcer sa coopération avec les autorités libyennes, et a négocié par exemple un accord avec les tribus dans le sud du pays pour s’efforcer de limiter les entrées de migrants venant des pays voisins comme le Tchad ou le Niger.

Les «ONG-taxis» dans le collimateur de Rome

 

Et depuis plusieurs semaines, les ONG actives en Méditerranée centrale sont dans le collimateur des autorités italiennes. Ces derniers mois, certaines ont déjà été accusées d’être en contact direct avec des trafiquants d’êtres humains en Libye pour récupérer «comme des taxis» les migrants à la dérive, coupant au passage leurs outils de géolocalisation. Une autre enquête est en cours auprès du parquet de Catane (Sicile).

 

C’est précisément ce type de soupçons qui a conduit l’Italie à finaliser lundi un «code de conduite». Accepté seulement par trois ONG sur un total de neuf opérant dans cette zone méditerranéenne, il pourrait conduire à une moindre présence des navires d’ONG au plus près des eaux libyennes.

 

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