Donald Trump affirme de plus en plus que l’élection présidentielle de novembre contre Hillary Clinton pourrait être «truquée», une attaque préventive qui coïncide avec de mauvais sondages pour le candidat républicain et risque de saper la légitimité du scrutin.
Le candidat républicain traverse une période de fortes turbulences, après une accumulation de polémiques qui l’ont fait plonger dans les sondages et ont relancé les défections dans son propre parti. La démocrate, à la suite d’une convention démocrate réussie la semaine dernière, a repris une avance moyenne de six points, et la dernière enquête Fox News, parue mercredi, accorde 49% des intentions de vote à Hillary Clinton contre 39% à Donald Trump.
«Croyez-moi, il faudra qu’on fasse attention le 8 novembre, car cette élection sera truquée», a dit le candidat sur Fox News lundi. «Et j’espère que les républicains seront vigilants, sinon la victoire nous sera dérobée.»
Le même jour, dans un meeting à Columbus (Ohio), il a affirmé: «Je me dois d’être honnête avec vous. J’ai peur que l’élection ne soit truquée.»
VIDEO. Donald Trump sous-entend que l’élection pourrait être truquée (Fox News)
L’allégation, répétée depuis, a fait bondir le président Barack Obama, interrogé jeudi lors d’une conférence de presse au Pentagone. «Bien sûr que l’élection ne sera pas truquée», a-t-il dit. «Si M. Trump croit qu’une théorie du complot se propage dans le pays, y compris dans des endroits comme le Texas où ce ne sont pas les démocrates qui s’occupent des bureaux de vote, c’est ridicule.» «Si M.Trump finit avec 10 ou 15 points d’avance dans les sondages le jour de l’élection et finit par perdre, il pourra peut-être se poser la question. Cela ne semble pas être le cas actuellement,» a conclu Barack Obama.
VIDEO. Les accusations de Trump sont « ridicules » pour Barack Obama (CNBC)
Durant les primaires républicaines, Donald Trump avait déjà accusé son adversaire Ted Cruz d’avoir triché de multiples façons après les victoires du sénateur du Texas dans l’Iowa, en février, et dans le Wisconsin, en avril.
Ces nouvelles accusations, faites sans preuves, alimentent les soupçons vis-à-vis d’un système électoral qui est loin d’être parfait, comme l’a montré le chaos de l’élection de 2000 entre George W. Bush et Al Gore, lors duquel il avait fallu plus d’un mois pour certifier le résultat du scrutin très serré de Floride.
Réformer le système électoral
De moins en moins d’électeurs disent faire confiance aux résultats des élections. Selon le Pew Research Center, en 2004, 48% des Américains avaient une grande confiance dans le dépouillement des votes. En 2012, ils n’étaient plus que 31%. Une réforme nationale a été lancée en 2002, mais toute harmonisation est ralentie par la fragmentation du système, les élections étant de la compétence des Etats.
Si «le système électoral américain a de vrais problèmes» selon Michael Heaney, professeur de science politique à l’université du Michigan, «des déclarations comme celles de Trump, sans explication, alimentent le sentiment d’illégitimité du système.»
Coutumier de ce type d’accusations
Le milliardaire américain est un habitué des théories du complot.
En 2012, Donald Trump avait remis en cause la victoire de Barack Obama sur Mitt Romney au soir de l’élection. Il a aussi longtemps contesté la légitimité de la naissance américaine de Barack Obama, dont le père était kényan et la mère américaine.
John McCain, candidat républicain de 2008, avait accusé une grande association liée aux démocrates de commettre des actes de fraude électorale.
Mais «il est très rare qu’un candidat présidentiel suggère qu’un scrutin à venir soit truqué», affirme Lorraine Minnite, auteur d’un livre The Myth of Voter Fraud (Le mythe de la fraude électorale).
«Il essaie de se protéger contre une défaite», dit-elle. «Mais dénoncer un trucage du vote a aussi des connotations raciales aux Etats-Unis», ajoute-t-elle, en soulignant que de nombreux Etats contrôlés par les républicains avaient adopté des lois plus restrictives pour l’accès aux bureaux de vote, notamment en rendant obligatoire la présentation d’une pièce d’identité, ce qui selon les démocrates affecte de façon disproportionnée les populations pauvres et noires.
L’attitude de Donald Trump laisse présager un lendemain d’élection contesté.
«Dans l’histoire américaine, habituellement, les perdants acceptent dignement leur défaite», explique Dan Tokaji, expert du droit électoral à l’Ohio State University. «Mais Donald Trump montre déjà qu’il n’a aucune intention de perdre avec dignité.»
Source:Leparisien.fr