L’ONU tire la sonnette d’alarme et réclame ce mardi 200 millions d’euros pour « maintenir les gens en vie ». Au moins 188 personnes seraient déjà mortes.
« J’ai travaillé dans de nombreux endroits – la Centrafrique, le Darfour, le Soudan du Sud – et la situation des populations vivant dans les zones très rurales de l’État du Borno figure parmi les pires que j’aie eu à connaître », a indiqué à l’AFP Toby Lanzer, coordonnateur humanitaire régional de l’ONU pour le Sahel. Selon lui, les organisations humanitaires ont besoin de financements d’urgence pour secourir des milliers de personnes menacées par la famine dans le nord-est du Nigeria.
Après une tournée dans l’État de Borno, épicentre des agissements de Boko Haram, il s’est dit « horrifé » par la situation de la population des villes de Bama, de Dikwa et de Monguno. « Il y a une urgence extrême », a-t-il martelé tout en indiquant que 220 millions de dollars (200 millions d’euros) étaient nécessaires pour « maintenir les gens en vie » dans ces zones lors des dix prochaines semaines.
Ces fonds, s’ils sont réunis, seront destinés à l’approvisionnement en eau potable, médicaments, couvertures et vivres, précise le coordinateur régional, tout en félicitant les Nigérians pour leurs efforts sous forme d’aide alimentaire d’urgence (10 000 tonnes de vivres), de visas aux agences internationales et de facilités douanières.
« Des dizaines de personnes meurent chaque jour de malnutrition. Nous estimons qu’il y a là 15 000 personnes et que sur ce nombre cinq meurent chaque jour au moment où nous parlons », prévient le responsable onusien.
L’économie du Nigeria, premier producteur de pétrole d’Afrique, est durement frappée par la chute des cours mondiaux du brut et le pays n’a pas les moyens d’en faire plus financièrement pour aider ces populations, selon Toby Lanzer. Sans parler de la difficulté pour les ONG d’approvisionner certaines villes comme Bama, située à 70 kilomètres de Maiduguri, la capitale de l’État de Borno, à cause des risques d’embuscade de Boko Haram toujours importants.
Médecins sans frontières (MSF) qui a pu récemment se rendre sur place affirme qu’au moins 188 personnes sont mortes, principalement de diarrhée et de malnutrition dans un camp de cette ville entre le 23 mai et le 22 juin. Et d’après l’Unicef, 250 000 enfants de moins de cinq ans vont souffrir de malnutrition sévère extrême dans l’État de Borno cette année, dont 50 000 risquent même de mourir si rien n’est fait.
L’organisation Famine Early Warning Systems Network (FEWS NET), financée par l’aide publique américaine, a quant à elle estimé, vendredi 8 juillet, qu’ »une famine pourrait se produire dans les poches les plus touchées et les moins accessibles de l’État ».
La famine est déclarée quand au moins 20% d’une population souffre d’une manque aigu de nourriture, qu’au moins 30% des enfants souffrent de grave malnutrition et que le taux de mortalité quotidien dépasse les 2 pour 10 000. M. Lanzer évoque pour l’instant un « degré en dessous » de la famine. « En vingt ans de missions dans ce genre d’endroits je n’ai jamais vu de famine. Je ne veux pas que ça m’arrive. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour l’éviter », assure-t-il. Et d’ajouter : « Je pense que la communauté internationale s’est montrée très hésitante jusqu’à présent à s’engager à un niveau visible. Mais nous en sommes maintenant au stade où nous devons passer à la vitesse supérieure. »
Source:jeuneafrique.com