Une révolution sociétale ? Il y a tout juste un an explosait ce qui est depuis devenu l’affaire Weinstein. Début de la fin pour le magnat d’Hollywood, mais aussi commencement d’une révolution mondiale : quelques jours plus tard, sur les réseaux sociaux les hashtags #MeToo et #balancetonporc témoignent de l’ampleur des violences faites aux femmes au quotidien.
Cette explosion de la parole a donné de l’espoir. Notamment dans les associations qui épaulent les femmes victimes de violence, où l’on a pu croire que, désormais, ces femmes seraient davantage accompagnées vers la plainte, la justice et la reconstruction. Or, un an après, un bilan en demi-teinte révèle certes une prise de conscience évidente, mais, toujours, un manque de moyens.
Des associations très sollicitées
« Depuis un an, il y a eu une prise de conscience de l’ampleur de la violence faite aux femmes, explique Françoise Brié, directrice de la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), réseau d’associations spécialisées dans l’accompagnement des femmes victimes de violences. La question plus compliquée maintenant, c’est comment on répond aux besoins de réparation de ces femmes et comment prévenir ces violences. »
Ce qui est acté, c’est que les femmes ont pris la parole. Pas seulement dans un contexte privé, mais aussi dans les commissariats et auprès des associations. Pour preuve, nombre d’associations se sont fait l’écho d’une hausse des demandes d’aide, qui ne s’est depuis pas tari. « On a constaté entre 30 et 40 % de demandes en plus du côté des associations depuis l’affaire Weinstein », confirme Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes.
Au point que certaines n’arrivaient plus à faire face : l’Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail (AVFT) avait dû fermer son accueil téléphonique de janvier à juin. « Depuis juin le nombre d’appels et de mails est toujours aussi élevé, affirme Laetitia Bernard, juriste à l’AVFT. Et ce qui est nouveau, c’est la demande d’aide de la part de syndicalistes, d’employeurs, d’inspecteurs du travail, de professionnels de santé… »
Manque de moyens
Mais comment faire face à cet afflux ? « Ce qui nous inquiète, c’est le manque de moyens : le budget du secrétariat pour l’Egalité entre les hommes et les femmes n’a pas gagné un euro par rapport à ce qui était prévu en septembre 2017 : en clair, avant et après #Metoo, budgétairement, il ne s’est rien passé ! », tempête Anne-Cécile Mailfert. Faux, répondrait le ministère, qui a débloqué une enveloppe de 1 million d’euros pour certaines associations qui ont remporté l’appel à projets national et régional.
« Ces subventions viennent combler un manque, mais nous sommes inquiètes pour la suite, notamment pour les structures au niveau régional, nuance Laetitia Bernard de l’AVFT. Quand les appels à projet seront terminés, elles vont continuer à accompagner les femmes, mais n’auront plus les financements nécessaires. Ces appels à projet, cela a permis de faire la com’, mais ça ne va résoudre le problème sur le long terme. »
Les citoyens, relais de financement
Pourtant, la région Ile-de-France et la Mairie de Paris ont rallongé les subventions de l’AVFT et la FNSF notamment. « Plus globalement, les 67 associations de notre réseau travaillent à flux tendu, il faut de toute façon que les enveloppes budgétaires soient plus importantes. Le mouvement #metoo a joué un rôle positif, mais la réponse des pouvoirs publics n’est pas à la hauteur », résume Françoise Brié.
Des moyens qui peuvent aussi venir des citoyens directement. La Fondation des femmes a ainsi collecté en six semaines 250.000 euros auprès des particuliers avec son opération « maintenant on agit », « Une initiative inédite, souligne Anne-Cécile Mailfert, sa présidente. Les Français ont entendu que les associations étaient débordées. Et que c’est aussi en donnant qu’on peut faire baisser les violences faites aux femmes. »