Arrivé samedi à Antananarivo, le roi du Maroc marche dans les pas de sa famille, exilée en 1954 dans la Grande Île par les autorités françaises. Une histoire commune sur laquelle il entend capitaliser pour consolider ses amitiés africaines dans la perspective du retour du royaume au sein de l’UA.
Pas de répit pour Mohammed VI et la délégation marocaine qui l’accompagne dans ses voyages en Afrique. Alors que le rideau n’était pas encore tombé sur la COP22, l’avion royal s’est envolé jeudi 17 novembre pour l’Éthiopie et, trois jours plus tard, pour Madagascar où le roi du Maroc devrait participer au sommet de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) qui se tient du 22 au 27 novembre à Antananarivo.
Reçu par le président malgache Hery Rajaonarimampianina, qui a participé quelques jours plus tôt au sommet des chefs d’État à la COP22, Mohammed VI a foulé pour la première fois une terre sur laquelle s’est écrit un pan de l’histoire de sa famille. En 1954, en pleine résistance contre le protectorat français, son grand-père Mohammed V et ses enfants, dont le futur roi Hassan II, avaient été envoyés en exil à Antsirabe, chef-lieu de la région Vakinankaratra, dans le centre de l’île. Ils avaient résidé à l’hôtel des Thermes pendant plus de deux ans avant de revenir au Maroc en novembre 1955.
Une visite empreinte de souvenirs
Dans cette ville, où la population cultive encore le souvenir d’une famille soudée autour d’un roi libérateur, Mohammed VI procédera à la pose de la première pierre d’un grand hôpital dédié à la santé de la mère et de l’enfant, ainsi que celle d’un centre de formation professionnelle qui pourra accueillir près d’un millier d’apprentis, signale la revue de la présidence malgache. Ces projets sociaux montrent la volonté du roi du Maroc de capitaliser sur le lien affectif entre les habitants de cette ville et la monarchie marocaine pour consolider ses amitiés dans le pays.
Comme pour les précédentes escales africaines, la nouvelle page que Rabat désire ouvrir avec Antananarivo s’écrira en deux chapitres : l’un économique, à travers la signature de 22 conventions et accords de coopération bilatérale, et un autre politique, dans la perspective de la réintégration du Maroc dans l’Union africaine (UA). Madagascar a suspendu sa reconnaissance de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) en avril 2005, lors d’un voyage officiel au Maroc de l’ancien président malgache Marc Ravalomanana, et s’en est remise au processus des Nations unies. Au sommet de l’UA à Kigali en juillet, Hery Rajaonarimampianina a apporté son soutien au retour du Maroc au sein de l’union panafricaine.
Économie : le méga-projet de l’OCP en Éthiopie
En Éthiopie, le séjour du roi du Maroc a jeté les bases d’un rapprochement qui se fera sur la durée. Addis Abeba, siège de l’UA, est un fervent défenseur de la RASD, ce qui ne l’a pas empêché, à l’issue de la visite royale, d’exprimer son soutien à la décision du Maroc de réintégrer l’UA. Ce qui n’est pas rien, pour une première visite royale.
Les diplomates marocains savent qu’ils ne peuvent pas obtenir une victoire diplomatique du jour au lendemain dans des pays anglophones longtemps absents de leurs radars (Après Madagascar, la Zambie et le Nigeria sont au programme royal). « Mais si on arrive à briser la glace, c’est déjà un acquis », confient-ils.
Pour réaliser son objectif, Rabat n’hésite pas à faire valoir de solides arguments économiques. À Dire Dawa, deuxième plus grande agglomération en Éthiopie, l’Office chérifien des phosphates (OCP) a annoncé un projet de production d’engrais de 3,7 milliards de dollars en deux phases, « soit le plus grand investissement de l’Office en dehors du Maroc », selon Mostafa Terrab, PDG de l’OCP.
L’Éthiopie, quatrième économie du continent, fera l’objet d’un partenariat « tous azimuts », selon les termes du communiqué conjoint publié à l’issue de la visite royale. Sept conventions et accords-cadres ont été signés entre les deux pays dans les services aériens, la coopération en matière fiscale, la protection des investissements, l’agriculture et les énergies renouvelables. Fraîchement nommée, l’ambassadrice du Maroc à Addis Abeba, Nezha M’hamdi Alaoui, en assurera le suivi.