Dans l’histoire de notre pays toutes les conquêtes sociales et démocratiques ont été obtenues par l’engagement du mouvement syndical et des citoyens des couches populaires.
Ce fut les cas lors de:
– la grande grève des cheminots en 1947 immortalisée par Sembène Ousmane dans les « bouts de bois de dieu » qui raconte la marche des femmes de Thiès à Dakar qui fut un tournant décisif pour les indépendances,
– de la grève générale de 1968 qui protesta contre la répression de la grève des élèves et étudiants et contraignit le pouvoir PS à concéder le« multipartisme limité puis intégral »,
– des grèves de la CSS en 1983 qui améliora les conditions de travail et les salaires,
– celles de l’usine de Taïba avec l’héroïque marche des femmes sur Thiès,
– celles de la SENELEC de 1992 en solidarité avec les personnels de la santé et puis contre les conséquences sociales des Plans d’Ajustement Structurel (PAS), la dévaluation du franc CFA, le projet de privatisation de l’électricité et les arrestations de syndicalistes.
Comment ne pas avoir mal de voir notre absence, celle du mouvement ouvrier syndical, dans les mobilisations actuelles de la jeunesse et du troisième âge contre la hausse des prix du courant et des denrées de premières nécessités ?
Comment ne pas avoir mal face au silence des centrales syndicales devant l’abus de pouvoir que sont ces infractions aux droits constitutionnels de la liberté de diffuser son opinion, de manifester et surtout face à ces emprisonnements illégaux de manifestants et la détention arbitraire de Guy Marius à la prison dans le quartier de haute sécurité pour « terroristes » du Camp Pénal ?
Le chemin de fer, dont notre belle ville historique est la capitale, a été privatisé puis abandonné, l’industrie textile qui donnait du travail à nos enfants a été sacrifiée, la Sonatel, dont la rentabilité et le savoir-faire ont été bradés à la multinationale française Orange qui s’est emparée du secteur des télécoms de toute l’Afrique de la zone CFA coloniale, l’eau vient d’être donnée à une entreprise étrangère, bref la liste des dénationalisations – privatisations – bradages des fleurons de notre jeune industrie et entreprises nationales (plus de 180) est longue sans compter celles que les diktats libéraux du FMI, de la Banque Mondiale, puis la dévaluation du franc CFA ont fait disparaître comme BATA, l’industrie de la chaussure à Rufisque, etc.
Les travailleurs, leurs syndicats ne peuvent continuer à se taire, il faut retrouver le sens du devoir, le joom, le fulle, le fayda de nos anciens comme Ibrahima Sarr dirigeant de la grève cheminote de 1947, Birahim Diawara, agent technique de la Régie et Bassirou Sarr, ouvrier imprimeur, signataires du Manifeste du PAI en 1957, lequel appelait à l’indépendance.
Nous devons dire NON à la vie chère et NON a l’emprisonnement illégal de nos jeunes comme Guy Marius.
Nous savons que sous la surface du silence officiel des grandes centrales, il y a la montée de l’incompréhension et de la colère de la base. J’appelle les travailleurs, les syndicats à reprendre le chemin de la lutte pour que nos familles et nos enfants vivent mieux que nous les anciens.
Février 2020
Oumar BA, Retraité Cheminot, ex-Secrétaire Général du syndicat des cheminots, membre fondateur de l’UNSAS et membre de Yoonu Askan Wi