Le procès du narcotrafiquant El Chapo s’ouvre sous haute sécurité à New York

Un dispositif hors norme a été déployé pour encadrer le procès du trafiquant de drogue mexicain El Chapo qui s’ouvre lundi à New York. Il pourrait s’agir du procès le plus cher du pays avec un coût probable de 50 millions de dollars.

Le Mexicain Joaquin « El Chapo » Guzman, extradé aux États-Unis en 2017 après deux évasions au Mexique, sera jugé sous haute sécurité à New York à partir de lundi 5 novembre. Il est accusé d’avoir dirigé 25 ans durant le plus puissant cartel de drogue au monde.

À en croire les procureurs américains, « El Chapo » -« Le Courtaud », en référence à sa petite taille – est le plus puissant narcotrafiquant depuis le Colombien Pablo Escobar, mort en 1993. S’il est condamné, il risque la prison à perpétuité.

 

Des menaces possibles

Joaquin Guzman, 61 ans, est accusé d’avoir dirigé de 1989 à 2014 le cartel de Sinaloa, qui a expédié aux États-Unis plus de 154 tonnes de cocaïne ainsi que d’énormes quantités d’héroïne, de méthamphétamines et de marijuana, pour une valeur estimée à 14 milliards de dollars.

La sélection du jury doit commencer dès lundi matin, à huis clos, une mesure réservée aux criminels les plus dangereux. Signe des menaces possibles, les noms des jurés resteront secrets et des gardes les escorteront chaque jour au tribunal.

Après environ quatre mois d’audiences, ils devront décider si les preuves sont suffisantes pour déclarer El Chapo coupable des onze chefs d’accusation contre lui, dont trafic et distribution de drogues, possession d’armes à feu, blanchiment d’argent. Il a plaidé non coupable. Il n’a pas été inculpé de meurtre mais les procureurs assurent pouvoir aussi démontrer qu’il a commandité au moins 37 assassinats.

Isolé 23h/24

Ils affirment aussi avoir une montagne de preuves de sa culpabilité aux onze inculpations, submergeant les avocats de la défense qui déplorent ne pas avoir pu toutes les examiner : quelque 300 000 pages de documents, 117 000 enregistrements audio et quantités de photos et vidéos.

Beaucoup de documents restent confidentiels tout comme la liste des anciens associés, employés ou rivaux de Joaquin Guzman appelés à témoigner. Certains bénéficient de la protection du gouvernement américain, sous de nouvelles identités. D’autres sont détenus dans des prisons spéciales pour empêcher toutes représailles.

Après avoir échappé deux fois à ses geôliers mexicains, El Chapo fait l’objet de conditions de détention draconiennes depuis son arrivée aux États-Unis en janvier 2017, que ses avocats n’ont cessé de dénoncer.

Il est à l’isolement dans une cellule sans fenêtre 23 heures sur 24. Les seules personnes autorisées à lui rendre visite, à travers une vitre, sont ses avocats et ses jumelles de sept ans. En revanche, sa femme Emma Coronel, une reine de beauté de 29 ans, qu’il a épousé quand elle en avait 17, est interdite de visite.

Arrêté une première fois au Guatemala en 1993, El Chapo s’était échappé en 2001 d’une prison mexicaine, caché dans un bac à de linge sale. Interpellé en février 2014, il avait réussi à s’enfuir quatorze mois plus tard, via un tunnel de 1,5 kilomètre de longueur creusé sous la douche de sa cellule.

Il a été repris en janvier 2016. Les autorités avaient retrouvé sa trace après qu’il eut reçu dans la jungle l’acteur américain Sean Penn et l’actrice américano-mexicaine Kate del Castillo, venus l’interviewer pour faire un film sur sa vie.

« Le procès le plus cher » des États-Unis

Selon Rob Heroy, un ancien procureur et avocat ayant défendu d’autres narcotrafiquants mexicains, ce procès pourrait coûter plus de 50 millions de dollars. Potentiellement « le procès le plus cher de l’histoire des États-Unis », a-t-il indiqué à l’AFP.

Même sans Guzman, son cartel reste puissant. Son associé présumé, Ismael « El Mayo » Zambada, court toujours et le Mexique souffre plus que jamais de l’emprise des narcotrafiquants, avec un record d’environ 29 000 homicides en 2017.

Et les États-Unis continuent à recevoir de leur voisin du sud d’importantes quantités de drogue, notamment des opiacés de plus en plus puissants, devenus une des principales causes de la mortalité américaine.

La seule tenue de ce procès est néanmoins un succès pour la justice américaine : bien qu’il eut inondé les États-Unis de cocaïne dans les années 1980, Pablo Escobar n’a jamais été jugé, le célébrissime Colombien ayant été abattu lors d’une opération policière à Medellin en 1993.

France 24

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