Au Mondial de l’automobile 2018, les regards sont en grande partie tournés vers les motorisations nouvelle génération, électriques ou à hydrogène, ainsi que vers le développement de l’autonomie des véhicules. Deux tendances qui vont de pair avec un sujet d’inquiétude : la protection des réseaux informatiques ( cybersécurité). Les voitures disposent en effet de logiciels de plus en plus nombreux, de plus en plus complexes et sont de plus en plus connectées. Et plus il y a d’informatique, plus il y a de possibilités de piratage.
« La voiture est en train de ralentir… Les gars, je suis coincé sur l’autoroute ! »: s’affole le journaliste du magazine Wired. Il y a 3 ans, Andy Greenberg avait volontairement accepté de faire pirater la Jeep qu’il conduisait par deux hackers. Ceux-ci avaient même réussi à prendre le contrôle de la direction du véhicule pour le faire aller dans un fossé.
Le véhicule autonome particulièrement vulnérable au hacking
Résultat : près d’un million et demi de voitures ont été rappelées. Depuis, BMW ou encore Tesla ont également vu leurs véhicules se faire publiquement pirater. Car les possibilités sont immenses : aujourd’hui une voiture milieu de gamme peut en effet embarquer environ 150 à 200 millions de lignes de code, de phrases informatiques. A titre de comparaison, un avion type Boeing 787 ancienne génération comprend 14 millions de lignes de code.
Et la menace va encore augmenter, comme l’explique Orit Fredkof, vice-présidente d’Enigmatos, start-up israélienne spécialisée dans la lutte contre le piratage des véhicules : «Les futurs véhicules vont être encore plus connectés, ce qui va offrir de nouveaux points d’entrée au pirates et dans le cas des voitures autonomes, qui n’auront plus de conducteurs mais seront gérées par un réseau informatique, la tentative de hacking est quasiment inévitable».
La cybersécurité des véhicules, un secteur en plein essor
Le danger est pris en compte par les constructeurs. Mais peut-être pas assez, selon Serguey Kravchenko, responsable de la sécurité automobile chez l’éditeur d’antivirus Kaspersky : « Les constructeurs sont très impliqués à ce sujet, mais ce sont des spécialistes de l’automobile, pas de la cybersécurité. Nous sommes meilleurs qu’eux dans ce domaine parce que l’on sait où chercher et comment protéger». Alors certes, ces spécialistes de la cybersécurité prêchent pour leur paroisse, mais la vulnérabilité de ses véhicules a poussé par exemple Volkswagen à lancer sa propre société anti-piratage il y a deux ans avec à sa tête un ancien dirigeant des services de renseignement israéliens.
Enigmatos de son côté a déjà des contacts avec des constructeurs pour développer son système de protection individualisée des véhicules, car chaque voiture a en effet sa propre identité informatique. Et les enjeux sont colossaux : les futures voitures seront autant jugées sur leur sûreté informatique que sur leur esthétique ou la résistance de leurs pièces. Car un piratage peut aller de l’extorsion de fonds pour faire démarrer votre véhicule au détournement de vos données personnelles aspirées depuis votre téléphone connecté à la voiture, voire à l’assassinat ciblé piloté par des pirates employés par des États. Sécuriser les véhicules et rassurer le public à ce sujet est donc devenu une priorité pour les constructeurs.
RFI