Interpol a annoncé dimanche soir la démission de son président chinois Meng Hongwei, dont sa famille est sans nouvelle depuis plus de dix jours. Plus tôt, Pékin a annoncé qu’il faisait l’objet d’une enquête, soupçonné d’avoir « violé la loi ».
Les autorités chinoises avaient jusque-là gardé le silence sur le sort le président d’Interpol. Dimanche 7 octobre, elles ont levé une part du mystère qui entoure l’inquiétante disparition de Meng Hongwei, dont on est sans nouvelle depuis la fin septembre. L’office chinois de lutte contre la corruption a annoncé sur son site que ce dernier faisait l’objet d’une enquête pour avoir « violé la loi » et les ‘règles du parti ».
« Il a bien été interpellé à sa descente d’avion », le 25 septembre à Pékin, affirme le correspondant de RFI en Chine, Stéphane Lagarde. « Il est depuis interrogé par la commission de discipline du comité central ».
Quelques heures après cette annonce, Interpol dit avoir reçu la démission de son président chinois, à la tête du réseau depuis novembre 2016 – et a annoncé une démission « avec effet immédiat ».
Une enquête pour disparition inquiétante a été ouverte en France. Meng Hongwei, 64 ans, qui résidait avec sa famille à Lyon, où se trouve le siège d’Interpol, n’a plus donné signe de vie depuis son départ en Chine fin septembre.
« En danger »
En France, son épouse a été placée sous protection policière pour avoir reçu des menaces. Devant la presse, elle a fait part de sa vive inquiétude en révélant que le dernier message reçu du téléphone de son mari, le 25 septembre alors qu’il était en Chine, ne comportait qu’une émoticône représentant un couteau. « Attends mon appel », lui avait-il indiqué dans un précédent message.
« Je ne suis pas sûre de ce qui lui est arrivé », a-t-elle répondu au sujet d’une éventuelle arrestation, tout en étant persuadé qu’il était « en danger ».
« Ruine politique »
Pour elle, le sort réservé à son mari, sous les yeux de l’opinion publique mondiale, relève de la « ruine politique ». « Tant que je ne le vois pas en face de moi, en train de me parler, je ne peux pas avoir confiance », a-t-elle ajouté tout en refusant d’être photographiée ou filmée de face.
« Cette affaire relève de la justice. Cette affaire concerne la communauté internationale. Cette affaire concerne le peuple de mon pays », a-t-elle dit d’une voix tremblante, étouffant un sanglot. « Bien que je ne puisse pas voir mon mari, nos cœurs sont toujours liés. C’est grâce à cela qu’il tiendra le coup.
De son côté, Paris avait fait part vendredi de son « interrogation » sur la situation de Meng Hongwei. Mais ce n’est pas la première fois que des personnalités de haut rang de la diaspora chinoise, en France ou dans d’autres pays, manquent subitement à l’appel sur fond de campagne anticorruption menée par Pékin, soupçonnée de servir en même temps de purge politique.
Des précédents
En France, en 2015, l’homme d’affaires Mike Poon, alors au centre du rachat de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, avait disparu des radars pendant plusieurs mois, expliquant à son retour avoir été interrogé dans le cadre d’une enquête sur le secteur aéronautique. La même année en Chine, c’est le président du conglomérat Fosun, propriétaire du Club Méditerranée, le milliardaire Guo Guangchang, qui avait disparu de façon énigmatique pendant quelques jours.
Meng Hongwei, lui, a gravi les échelons de l’appareil sécuritaire chinois au temps où celui-ci était dirigé par un rival de Xi Jinping, Zhou Yongkang. Ce dernier purge actuellement une peine de prison à perpétuité après avoir été condamné en 2015 pour corruption, abus de pouvoir et divulgation de « secrets d’État ».