Dans le cadre de l’appel d’offres international relatif à la sélection d’un opérateur privé chargé de la gestion du service public de production et de distribution d’eau potable en zone urbaine et péri-urbaine, l’Etat du Sénégal a pris l’option de maintenir, dans les engagements du repreneur, tous les acquis sociaux du personnel de la Sénégalaise des Eaux (SDE). En plus des considérations techniques et financières très décisives, l’Etat entend valoriser le capital humain et favoriser une meilleure mobilisation en direction des défis de la qualité de vie des populations. Ainsi, concernant l’actionnariat de la future société de gestion, les dispositions du dossier d’appel d’offres indiquent que le partenaire stratégique détient 45% du capital social et la partie sénégalaise 55% répartis comme suit : secteur privé national 25 % ; Etat du Sénégal 25% et salariés 5%.
Après la confirmation par l’Autorité de Régulation des Marchés publics (ARMP) de l’attribution du contrat au groupe SUEZ par une décision en date du 29 mai 2019 et notifiée le 14 juin 2019, le Ministre de l’Eau et de l’Assainissement a reçu, le 28 juin 2019, les cinq secrétaires généraux de syndicat de la SDE qui avaient demandé le relèvement de leur part dans le capital de 5% à 15%. Depuis lors et jusqu’au début de leur mouvement de grève le 2 décembre dernier, le Ministère de l’Eau et de l’Assainissement a reçu, à cinq reprises, les représentants du personnel de la SDE, sans compter la rencontre tenue le 29 novembre 2019 à l’initiative du Ministère du Travail, du Dialogue social et des Relations avec les Institutions. Cette ouverture traduit le choix de la concertation dans la préservation des intérêts des travailleurs comme de ceux de tous les Sénégalais. Cette option a toujours accompagné le processus de réforme, afin de lui donner une dimension sociale aboutie.
Durant la même période, dans une démarche inclusive, le Ministre de l’Eau et de l’Assainissement a également reçu les représentants des syndicats du personnel de la SONES et de l’Office national de l’Assainissement du Sénégal (ONAS) qui ont réitéré leur demande de participation au capital de la future société de gestion en invoquant le besoin de « correction d’une injustice » datant de la réforme de 1996. En effet, cette dernière prévoyait une prise de participation, à hauteur de 5%, de tout le personnel de l’ancienne Société nationale d’Exploitation des Eaux du Sénégal (SONEES), personnel qui s’est retrouvé réparti dans les trois entités nées de la réforme, à savoir la SONES, l’ONAS et la SDE ; les 5% étaient répartis en raison de 3,5% pour les travailleurs de la SDE et 1,5% à partager entre ceux de la SONES et de l’ONAS.
Cette entrée du personnel du secteur dans le capital de la SDE n’a finalement été effective qu’en 2011 au bénéfice exclusif du personnel de la SDE qui souscrit la totalité des 5%, appuyé en cela par leur entreprise ; les travailleurs de la SONES et de l’ONAS n’ayant pas réussi à mobiliser à temps leur quote-part de 1,5%.
Face aux demandes de relèvement de leur part formulées par les travailleurs de la SDE et de « correction d’une injustice » transmises par ceux de la SONES et de l’ONAS, le Gouvernement, en dépit des engagements pris dans le dossier d’appel d’offres remis en 2017 aux candidats, a concédé un relèvement de la part de l’ensemble des salariés du secteur, en la faisant passer de 5 à 10% du capital social de la future société d’exploitation ; les premières consultations avaient conduit à retenir 6 % pour le personnel de la SDE et 4% à partager entre les travailleurs de la SONES et de l’ONAS. Le Gouvernement a également accepté la représentation des travailleurs au Conseil d’administration.
Plusieurs concertations ont eu lieu avec les représentants des employés des trois entités (SDE, SONES, ONAS). A la suite de ces rencontres, le mardi 3 décembre 2019, le Ministre de l’Eau et de l’Assainissement a reçu, à deux reprises, à tour de rôle et de manière séparée, chaque représentation syndicale. Le Gouvernement a accepté, avec l’accord des représentants des syndicats de la SONES et de l’ONAS, de faire une importante concession aux travailleurs de la SDE consistant à porter leur part dans le capital de 5% à 7%, leurs collègues de la SONES et de l’ONAS se partageant les 3% restants. Cette répartition respecte au demeurant strictement les proportions qui avaient été initialement convenues et acceptées en 1996 quand les agents de la SDE s’étaient vu octroyer 3,5% sur les 5% réservés aux travailleurs, ceux de la SONES et de l’ONAS se partageant les 1,5% restants
Malgré cette importante avancée, le Gouvernement constate, avec regret, que les travailleurs de la SDE campent sur leur position intransigeante en exigeant que les 10% du capital consentis aux travailleurs du secteur leur soient intégralement réservés, à eux seuls, en excluant donc les travailleurs de la SONES et de l’ONAS quand bien même les trois entités constituent un seul secteur.
Si le Gouvernement reste ouvert à un dialogue constructif avec les syndicats de la SDE, il considère, en tant que garant des intérêts de tous, qu’une telle prétention n’est pas acceptable ; la satisfaire permettra certes d’éteindre un feu mais risque d’en allumer d’autres.
A cet égard, le Gouvernement rappelle tout d’abord que des travailleurs ne peuvent déclencher une grève pour demander une participation au capital d’une société privée de surcroît ; l’employeur aurait pu donc se prévaloir du caractère illégal de cette grève ; malgré cela, le Gouvernement reste disponible et ouvert.
Plus grave, le Gouvernement constate que des actes de sabotage sont opérés à travers notamment l’occupation de sites, la fermeture de vannes, l’arrêt d’installations de traitement d’eau, actes destinés à perturber la distribution normale de l’eau et prendre les populations en otage.
Le Gouvernement tient à informer les auteurs de ces faits, à quelque niveau de responsabilité qu’ils puissent se trouver, qu’il s’agit là d’actes inacceptables et répréhensibles qui seront considérés comme tels avec toutes les conséquences que cela induit dans un Etat de droit.
Le Gouvernement rappelle également que l’Etat du Sénégal a conclu avec la SDE un contrat d’affermage encore en vigueur ; dans ce contexte, elle reste garante et responsable d’une fourniture régulière d’eau de qualité aux populations. Il lui appartient, dès lors, de prendre toutes ses responsabilités et toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à ces comportements irresponsables qui constituent de graves menaces pour non seulement le bien-être mais aussi et surtout la santé des populations, ainsi que pour le fonctionnement normal des établissements de santé notamment.
Dakar, le 4 décembre 2019
Le Ministère de l’Eau et de l’Assainissement