Certaines cellules sanguines ont une source surprenante : l’intestin

Alors qu’il est établi que la moelle osseuse est à l’origine des différentes cellules qui circulent dans le sang, des chercheurs ont constaté que l’intestin en produit aussi une infime partie. Une découverte qui s’avère intéressante car elle permettrait de diminuer les risques de rejet dans le cas d’une greffe intestinale.

L’intestin humain intéresse les scientifiques depuis plusieurs années pour son microbiote, un ensemble de micro-organismes (bactéries, virus, parasites, champignons…) non pathogènes qui joue un rôle dans les fonctions digestives, métaboliques et immunitaires de l’organisme. Des chercheurs du Vagelos College of Physicians and Surgeons (Etats-Unis) viennent de découvrir une autre particularité, jusqu’ici très peu connue. Ces derniers ont découvert que l’intestin peut fournir jusqu’à 10% des cellules sanguines en circulation à partir de son propre réservoir de cellules souches hématopoïétiques, à l’origine des différentes cellules du sang : globules rouges, globules blancs et plaquettes.

En effet, les scientifiques pensaient précédemment que les cellules sanguines sont créées exclusivement dans la moelle osseuse à partir d’une population particulière de cellules souches hématopoïétiques. La moelle osseuse est un tissu contenu dans tous les os du corps, où sont fabriquées les cellules souches hématopoïétiques capables de se multiplier et de se différencier en globules rouges, globules blancs et plaquettes. Pour les chercheurs cette découverte pourrait faire avancer les chances de succès des transplantations intestinales, seule option à long terme pour les patients atteints de la maladie de Crohn ou d’autres maladies en cas de défaillance de leur intestin.

Des globules blancs d’un nouveau genre

Actuellement lorsqu’une personne reçoit un organe transplanté, le système immunitaire reconnaît souvent ce nouvel organe comme étant étranger et décide de le détruire. De puissants médicaments immunosuppresseurs émoussent ces réponses, mais ont l’inconvénient de rendre le patient greffé beaucoup plus sensible aux infections et autres complications. Les taux élevés de rejet et les complications mortelles liées à l’immunosuppression ont donc limité le succès de la transplantation intestinale humaine. Mais les cellules souches hématopoïétiques en provenance de l’intestin du donneur pourraient s’avérer d’une grande aide pour que le receveur de la greffe la tolère mieux.

L’analyse des globules blancs en circulation chez les patients après une transplantation intestinalesuggère que les cellules dérivées de l’intestin du donneur ont mûri et ont été éduquées chez le receveur pour que celui-ci tolère ces nouveaux tissus. De même, les globules blancs fabriqués par le receveur après cette greffe peuvent être éduqués à la tolérance du tissu donné. « Nous montrons qu’il existe un dialogue immunologique entre les deux ensembles de cellules sanguines qui protègent la greffe du système immunitaire du patient et protège le patient de la greffe. », explique dans un communiqué le Pr Megan Sykes, directrice du Columbia Center for Translational Immunology.

Il serait possible d’améliorer les transplantations intestinales

Ce réservoir de cellules souches hématopoïétiques au niveau de l’intestin a été découvert lorsque les chercheurs ont remarqué que le sang des patients ayant subi une greffe intestinale contenait des cellules du donneur. Ils ont alors retrouvé la source de ces cellules sanguines : des cellules souches hématopoïétiques dont la provenance elle-même était l’intestin greffé. Et constaté par la suite que ces cellules sanguines créées à partir de cellules de l’intestin du donneur peuvent être bénéfiques pour le patient greffé : plus le patient contient dans son sang les cellules sanguines issues de l’intestin du donneur, moins il risque de rejeter sa greffe et donc d’avoir besoin de médicaments immunosuppresseurs.

Les chercheurs se demandent par ailleurs si introduire des cellules souches hématopoïétiques supplémentaires provenant du donneur dans l’organes greffé ne pourrait pas augmenter les chances d’une transplantation sans complications. « Cela pourrait améliorer la vie des patients. », ajoute Megan Sykes. « Notre objectif est d’obtenir une tolérance immunitaire, qui permettrait d’éliminer l’immunosuppression et que le greffon soit traité de manière autonome par le patient.» Leur prochaine étude consistera à augmenter le nombre de cellules souches hématopoïétiques délivrées au cours d’une transplantation intestinale, pour augmenter le nombre de cellules sanguines du donneur en circulation.

A terme, d’autres types de greffes pourraient bénéficier d’interventions similaires, même pour les organes qui ne semblent pas porter leurs propres réservoirs de cellules souches hématopoïétiques.Les chercheurs se montrent néanmoins prudents en ce qui concerne leurs conclusions, basées sur une analyse de 21 patients ayant subi une greffe intestinale. « Bien que la découverte d’une nouvelle population de cellules souches hématopoïétiques soit intéressante, elle ne justifie pas encore les modifications apportées à la norme de soins actuelle. », font-ils savoir. Selon l’Agence de la biomédecine, quatre patients étaient en attente d’une greffe intestinale au 1er janvier 2016 contre 12 en 2012 et 21 en 2010.

Santé Magazine

commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Translate »
RSS
Follow by Email
YouTube
Telegram
WhatsApp