Etats-Unis : Un Président enfin débarrassé de sa tenue de campagne

Devant le Congrès, Donald Trump s’est policé. Sans préciser pour autant la politique qu’il entend mener.  Analyse Philippe Paquet

Il a dit grosso modo la même chose, mais il l’a dit autrement. Cela suffit pour que, au lendemain de son premier discours devant les deux Chambres réunies du Congrès, mardi soir, les commentateurs saluent l’avènement d’un nouveau Donald Trump. Ce jugement traduit sans aucun doute l’aspiration générale à un apaisement, après quarante jours d’une présidence souvent tonitruante et chaotique. Cependant, le progrès ne dépasse peut-être pas de beaucoup le constat que dressait mercredi un des chroniqueurs télé du « New York Times » : Trump a montré qu’il pouvait se contrôler pendant une heure.Le changement a, certes, pu paraître spectaculaire. Le Président a renoncé à ses invectives et ses débordements pour se concentrer sur le téléprompteur qui lui dictait la marche à suivre. Il a, par conséquent, tenu un discours relativement plus articulé qu’à l’ordinaire, préparé par ses deux principaux conseillers, Stephen Bannon et Stephen Miller, et retravaillé, dit-on, jusqu’au dernier moment. Il a même renoncé à ses habituelles tirades contre la presse, rompue, selon lui, à la production de « fausses nouvelles ». Et il a limité le recours aux « faits alternatifs« , sans pouvoir, toutefois, résister une fois de plus à la tentation de comparer son élection à « un tremblement de terre« . Donald Trump est donc apparu globalement plus « présidentiel », et parfois consensuel, en tendant la main aux Démocrates pour préparer des lois dans l’intérêt de tous les Américains.

Peu ou pas d’informations concrètes

Si la manière a donc évolué, sur le fond, en revanche, le Président est resté fidèle à lui-même, livrant peu d’informations précises et concrètes sur ce qu’il comptait faire, au-delà de la répétition de ses promesses électorales. Il a, au contraire, accru parfois la confusion, par exemple sur le chapitre crucial de l’immigration. Quelques heures avant de s’exprimer au Capitole, Donald Trump avait créé la surprise en donnant à entendre à des journalistes qu’il était favorable, non plus à la déportation, mais à la naturalisation des millions de clandestins qui n’ont pas commis de délits sur le sol américain. Devant députés et sénateurs, il n’a pourtant pas formulé une telle idée, se bornant à prôner un système d’immigration fondé « sur le mérite« , à l’image, a-t-il indiqué, de ce que font l’Australie et le Canada.

Le Président n’a pas davantage expliqué comment il allait financer les mille milliards de dollars de grands travaux qui doivent constituer, à ses yeux, le programme le plus ambitieux de modernisation des infrastructures américaines depuis Eisenhower et la création du réseau autoroutier. Tout au plus a-t-il déclaré qu’il s’agirait d’une combinaison de fonds publics et d’investissements privés. Donald Trump n’a, par ailleurs, pas évité les contradictions, notamment en disant vouloir garantir la qualité de l’eau et de l’air, alors qu’il s’est d’ores et déjà prononcé, par décret, pour la suppression des lois qui protègent l’environnement en imposant des réglementations contraignantes à l’industrie américaine.

La marque d’Ivanka

Ce qui, en définitive, pourrait être l’enseignement le plus intéressant de ce premier « état de l’Union » de l’ère Trump, c’est la marque d’Ivanka que les analystes croient déceler dans l’insistance du Président sur des thèmes que l’on sait chers à sa fille, comme les conditions de travail des femmes. C’est ainsi qu’il a invité le Congrès à voter sans tarder une loi sur le congé parental, une priorité des Démocrates qui s’était jusqu’ici heurtée au mur républicain.

Donald Trump a confirmé sa volonté de présenter un budget privilégiant la sécurité intérieure et la défense (l’augmentation des dépenses du Pentagone a suscité les applaudissements du sénateur John McCain, jusqu’ici le plus déterminé des opposants républicains à Donald Trump). Il a également réaffirmé l’engagement des Etats-Unis au sein de l’Otan. Et s’est dit prêt à conclure des alliances même avec d’anciens ennemis… La Russie s’est ainsi invitée par la bande au Capitole.

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