L’un des avocats de Khalifa Sall, Me El Hadji Diouf, qui a furtivement rencontré, hier, son client soumis au feu roulant des enquêteurs, lui a demandé de ne plus répondre à leurs questions dès lors que ses droits en tant que suspect ne sont pas respectés, en l’occurrence l’assistance d’un avocat dès la présence à la police, en vertu des conventions de la Cedeao. Me Diouf s’est notamment offusqué du fait que la Police ne lui a pas permis d’assister à l’interrogatoire de son client.
Au demeurant, l’avocat n’est pas le seul à lui demander de ne pas répondre aux questions des enquêteurs. Le Maire de Mermoz Sacré-Cœur, Barthélemy Dias, est même allé plus loin, lui qui a soutenu que si Khalifa Sall répond aux enquêteurs, il aura violé la loi sur les collectivités locales car il reste convaincu que «le procureur de la République n’a pas compétence à enquêter sur des fonds votés par un Conseil municipal, dans le cadre de la libre administration des collectivités locales, et approuvés par le représentant de l’État ».
Un autre de ses proches, Moussa Sy, Maire des Parcelles Assainies, a, quant à lui, été plus radical. Il a argué, qu’à sa place, jamais il n’aurait répondu à la convocation de la Dic sur des questions qui relèvent « de fonds politiques ». Ce dernier, a, au passage, qualifié de « républicain » le Maire de Dakar qui l’a démontré en répondant aux questions des enquêteurs.
Une question se pose alors : Khalifa Sall, va-t-il, conformément aux suggestions de son avocat, arrêter de répondre aux questions des enquêteurs ? Une question d’autant plus intéressante qu’il ne faut pas compter sur lui pour révéler ce qui s’est passé devant les enquêteurs. Néanmoins, il nous semble que le silence n’est pas une bonne stratégie de défense.
Mieux, à l’état où se situe le dossier, les choses sont à l’étape de simple enquête. Ce qu’il faut savoir, à ce niveau, c’est que les Policiers de la Dic, soumis au principe d’hiérarchie, sont tenus d’enquêter. Il en est ainsi de leur supérieur, le Procureur. Tout ce beau monde ne fait que son travail.
Dans ces conditions, il serait heureux que Khalifa, en bon républicain, leur facilite le travail. Ceci est d’autant plus nécessaire que si le Maire de Dakar considère qu’il n’a rien à se reprocher, les arguments et éléments qu’il aura exposés devant les enquêteurs permettront au Procureur de se faire une religion ne lui permettant pas de transmettre un dossier perdu d’avance devant les juges. C’est compte tenu de tout cela que nous pensons que le silence n’est pas une bonne stratégie.
Il en est d’autant plus ainsi, qu’il sera aisé, pour le Maire, de reprendre les arguments avancés devant les enquêteurs de l’Ige car, il ne serait compréhensible que cette institution dépose son rapport alors qu’il n’a pas été, au préalable, soumis aux observations en défense de la personne dont la gestion est mise en cause. Pis, le silence est même suspect et contradictoire. Si Khalifa se tait devant les enquêteurs, va-t-il le faire devant le juge ? Nous n’en sommes pas aussi sûrs.
Alors, il serait d’ores et déjà souhaitable de coopérer avec des enquêteurs qui ne sont pas des ennemis. S’agissant de l’application de la directive sur la présence de l’avocat à la garde à vue, laquelle a fait l’objet d’une loi en interne dans le code de procédure pénale, il serait heureux que l’avocat trouve sa propre stratégie de la faire respecter pour son client. Si les policiers lui demandent de se référer au Procureur pour le respect de cette directive, l’avocat a les moyens de saisir les services du bâtonnier par exemple, si jamais il estime que ses droits en tant que défenseur ont été bafoués.