France:La Cimade accuse des médecins de pratiquer un « racket » auprès des migrants

L’association Cimade accuse des médecins de demander des sommes indues à des migrants pour la réalisation de certificats médicaux. Le ministère de la Santé est saisi.
« Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain… » Tout médecin qui se respecte a en tête ce passage du serment d’Hippocrate, ce code d’honneur que la profession est censée suivre à la lettre. Autant dire que le motif invoqué par l’AP-HP (Assistance publique – Hôpitaux de Paris) à la suite de la suspension, mardi dernier, d’un praticien hospitalier, a fait grand bruit au sein de l’assistance publique.

Cet hépatologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris XIIIe) est soupçonné d’avoir demandé à plusieurs reprises de l’argent en liquide à des migrants pour qu’il leur délivre un certificat médical, en vue d’obtenir un titre de séjour pour raisons de santé. Une enquête préliminaire est en cours auprès du parquet de Paris. Selon l’AP-HP, « cette enquête interne menée sur ce dossier laisse supposer que d’autres patients dans des situations comparables auraient également été amenés à faire de tels versements ».

S’agit-il d’un cas isolé ? Ce n’est pas l’avis d’une des principales associations d’aide aux migrants, la Cimade (Comité intermouvements auprès des évacués). Selon Laura Petersell, chargée de la thématique santé à la Cimade, « cette affaire est l’arbre qui cache la forêt. Nous avons constaté que de nombreux médecins se livraient à un racket auprès des migrants. Ils exigent d’eux le paiement de plusieurs centaines d’euros pour établir des certificats médicaux selon lesquels leur pathologie peut ouvrir droit à une demande de titre de séjour sur le territoire national. » « Normalement, poursuit la Cimade, les migrants, qui sont pris en charge par l’AME (NDLR : aide médicale d’Etat) ou la CMU (couverture maladie universelle) n’ont pas à avancer d’argent aux médecins, car la consultation est prise en charge par l’Assurance maladie. »

« Ces précaires n’ont pas non plus à payer, bien sûr, des dépassements d’honoraires ! Or nous avons recensé de nombreux témoignages sur ce sujet », affirme Laura Petersell.

Notamment celui de Marie-Pierre*, originaire du Cameroun. Son titre de séjour pour soins est en cours de renouvellement auprès de la préfecture de Bobigny (Seine-Saint-Denis) et elle a dû consulter un médecin agréé figurant sur une liste établie par les autorités administratives. « Quand il m’a reçue, il a juste pris mon poids et ma tension, et m’a demandé 90 €. C’est une somme très importante pour moi. Cela m’a beaucoup surprise. »

La Cimade a signalé par écrit ces entorses à la déontologie au ministère de la Santé. « Le ministère nous confirme que ces demandes d’honoraires de la part des médecins sont indues. Mais on attend des réponses fortes de leur part. »

Président de la section éthique et déontologie du Conseil national de l’ordre des médecins, le docteur Jean-Marie Faroudja estime que « de tels manquements justifient une procédure disciplinaire. Il n’y a pas de dépassements d’honoraires à demander à des patients vulnérables, relevant de la CMU. Ce sont des pratiques intolérables ».
Source:leparisien.fr

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