En Guinée, les militaires ont ouvert une série de réunions de quatre jours sur l’avenir du pays. Plus d’une semaine après le coup d’Etat contre le président Alpha Condé, la junte doit se prononcer sur un calendrier électoral.
Cette série de réunions intervient alors que l’inquiétude grandit quant à la rapidité avec laquelle la junte dirigée par le colonel Mamady Doumbouya cédera le pouvoir à un gouvernement de transition dirigé par des civils, comme l’ont demandé les médiateurs régionaux et la communauté internationale.
« L’enjeu aujourd’hui est de savoir s’il faut continuer à soutenir les autorités démocratiquement élues, et ce que signifie être démocratiquement élu. Les problèmes que nous rencontrons dans la sous-région, et pas seulement dans les pays où un coup d’État a eu lieu, c’est que vous avez à la fois des coups d’État civils anticonstitutionnels et des coups d’État militaires », déclare Niagalé Bagayoko, experte en sécurité et paix en Afrique de l’Ouest et centrale et présidente du Réseau africain du secteur de la sécurité.
Selon cette observatrice, la situation en Guinée relève également d’une crise de confiance dans les institutions. « Ce sont tous les systèmes multilatéraux, toutes les institutions qui avaient été construites pendant deux ou trois décennies pour promouvoir la bonne gouvernance, pour promouvoir la démocratie avec des dispositions juridiques très claires et contraignantes pour les États membres eux-mêmes, qui ne sont, en fait, pas appliquées aujourd’hui. »
La communauté internationale, en particulier des groupes comme la CEDEAO et l’Union africaine, ne font pas respecter les valeurs démocratiques, avance Niagalé Bagayoko. « C’est un réel sujet de préoccupation. Se rendre compte que beaucoup d’acteurs civils sont complètement délégitimés aux yeux de la population. C’est très important car il y a une crise de gouvernance très profonde dans la région. » Et d’ajouter : « Il est nécessaire de soutenir tous les acteurs dont l’agenda est définitivement de promouvoir et de défendre l’Etat de droit, l’ordre constitutionnel et les Droits de l’homme, parce que tous ces principes sont aujourd’hui vraiment en danger dans la sous-région ouest-africaine. »
Pour Niagalé Bagayoko, le calme relatif après le coup d’Etat pourrait trouver sa source dans l’appartenance ethnique du chef de la junte. « Mamady Doumbouya appartient au même groupe ethnique qu’Alpha Condé, qui a tout le temps joué avec les identités communautaires et ethniques. Mais cette fois, le coup d’État ne vient pas d’une autre communauté. Il vient de quelqu’un qui a la même origine, qui appartient à la même communauté malinké. Je pense donc que cela explique aussi pourquoi il n’y a pas eu beaucoup de protestations contre ce coup d’État. »
En attendant l’issue des pourparlers avec différents acteurs de la politique guinéenne, la junte a déjà signifié son intention de rouvrir les frontières terrestres avec les pays voisins.