Bien qu’apparemment innocente, l’utilisation passive des réseaux sociaux ne serait pas sans conséquence pour la santé mentale. Des recherches menées auprès d’étudiants montrent qu’elle peut réduire le bien-être affectif, le sentiment d’appartenance et la satisfaction de vivre, des symptômes de la dépression. Mais ce lien serait plus compliqué à expliquer qu’il n’y paraît.
Au cours de la dernière décennie, les plateformes de médias sociaux comme Facebook et Twittersont devenues un élément central de la vie quotidienne. Pour beaucoup, parcourir les médias sociaux est une habitude fréquente à chaque moment de libre, ne serait-ce que pour lire des commentaires ou regarder des photos et vidéos. Un comportement appelé « utilisation passive des médias sociaux » (PSMU), adopté le plus souvent pour faire passer l’ennui mais susceptible d’être très chronophage (demande beaucoup de temps). C’est pourquoi malgré la popularité massive de ces réseaux sociaux, leur impact sur la santé mentale et le bien-être des utilisateurs suscite de nombreuses questions.
Une nouvelle étude de l’Université d’Amsterdam (UvA) a permis de mettre en évidence une corrélation entre cette utilisation passive des médias sociaux et les symptômes de la dépression tels que la solitude et la fatigue. Pour en venir à cette conclusion, les chercheurs ont recruté 125 étudiants et ont comparé leur bien-être avec leur utilisation passive des médias sociaux sept fois par jour pendant 14 jours. Une application spéciale sur leur téléphone incitait à remplir un questionnaire sur la dépression à heures fixes. L’analyse de leurs réponses s’est concentrée sur trois délais : le court terme (dans les deux heures), le moyen terme (quelques jours plus tard ) et le long terme (14 jours plus tard).
Un cercle vicieux se met en place
Les résultats ont montré que bien que l’utilisation passive des réseaux sociaux ne permettait pas de prédire les symptômes de la dépression, il y aurait une relation notable entre un sentiment de mal-être et l’utilisation accrue des médias sociaux. « Sur le moyen terme, un sentiment de fatigue et de solitude indique que certains symptômes de dépression pourraient amener les individus à faire défiler les flux de médias sociaux », explique le Pr George Aalbers, auteur principal de l’étude. « Nous avons également constaté que l’utilisation passive des médias sociaux coïncidait avec une perte d’intérêt, des problèmes de concentration, de la fatigue et une impression de solitude au même moment. »
Les scientifiques ne savent pas cependant si l’usage passif des réseaux sociaux est à l’origine de ces symptômes ou inversement, et il s’agit là d’un futur sujet de recherche. Mais pour eux, l’étude montre surtout que le lien entre les médias sociaux et le bien-être psychologique est plus compliqué que de simplement affirmer que « les médias sociaux rendent les gens déprimés ». « Au lieu de cela, un comportement spécifique des médias sociaux semble associé à des symptômes de dépression spécifiques, et des recherches supplémentaires sont nécessaires pour comprendre comment cette utilisation des médias sociaux et la santé mentale s’influencent mutuellement. », ajoute le chercheur.
Les chercheurs estiment que la prochaine étape consiste à reproduire les résultats dans un contexte clinique. « Notre étude a utilisé un échantillon d’étudiants dans lequel les niveaux moyens de symptômes de dépression, de solitude et de stress étaient assez faibles. Comme les recherches suggèrent que les effets néfastes des médias sociaux pourraient être plus importants chez les personnes dépressives, un échantillon de patients pourrait montrer un lien plus prononcé entre utilisation passive de ces derniers et dépression. », concluent les chercheurs. Selon l’Organisation mondiale de la santé, la dépression est un trouble mental qui touche plus de 300 millions de personnes dans le monde.