La Tanzanie a réquisitionné l’armée pour acheter aux agriculteurs toute leur production de noix de cajou, à un prix très supérieur à ce que proposaient les acheteurs traditionnels. Le pari un peu fou du président John Magufuli : faire remonter les prix mondiaux de l’anacarde.
Situation totalement inédite en Tanzanie : c’est l’armée qui collecte les noix de cajou auprès des producteurs. Et elle est très généreuse : 3300 shillings tanzaniens le kilo, l’équivalent d’1,26 euros, deux fois plus que ce que préconisait, avant le début de la campagne, le Cashewnut Board of Tanzania, l’organisme qui organisait jusqu’alors les enchères dans le pays d’Afrique orientale.
3300 shillings le kilo soit 1,26 euro au producteur
L’ordre vient du chef de l’Etat. John Magufuli estimait que le prix payé au producteur n’était pas assez élevé. C’est vrai que le prix international de la noix brute s’était affaissé depuis février dernier. La demande occidentale d’amandes de cajou était décevante, la production africaine de noix brute très abondante. Les transformateurs vietnamiens et indiens, assis sur des stocks qu’ils avaient payés très cher, vendaient à perte l’amande de cajou décortiquée. Ils ont sifflé la fin de la partie.
Stocker avant la récolte ouest-africaine
Le président tanzanien peut-il réussir à faire rebondir les prix mondiaux ? Le calendrier des récoltes joue en sa faveur. La Tanzanie produit entre octobre et janvier. L’idée est de faire de la rétention le plus longtemps possible sur le sol tanzanien, avant les récoltes d’Afrique de l’Ouest qui commencent en février. Et ainsi d’assécher un peu le marché international de l’anacarde.
Pari coûteux
Mais le pari est très risqué : acheter aussi cher toute la récolte tanzanienne, qui pourrait atteindre 300 000 tonnes de noix brutes cette année, coûtera l’équivalent de 430 millions d’euros, 5 % du budget tanzanien. Les spécialistes de l’anacarde chez N’Kalo obervent bien un léger rebond des prix depuis l’annonce tanzanienne, que ce soit le prix la noix décortiquée, en Inde et au Vietnam, ou les prix bord champ payés au Mozambique, le pays voisin de la Tanzanie, où la récolte bat également son plein.
Surproduction africaine en vue
Il reste cependant beaucoup de stocks de noix non décortiquées en Afrique de l’Ouest, soulignent les experts, dont 100 000 tonnes en Côte d’Ivoire. Et si les importations de noix de cajou ont fortement repris aux Etats-Unis, la demande reste faible en Europe. Le regain des prix pourrait donc être de courte durée, car en février va débouler la production ouest-africaine de noix de cajou, et elle sera encore meilleure que l’an dernier : 900 000 tonnes sont attendues rien qu’en Côte d’Ivoire.
RFI