PARIS (AFP) –
« L’illusion est un défaut de perception: ce que l’on perçoit ne correspond pas à la réalité », explique à l’AFP Baptiste Bureau, chef de projet de l’exposition.
– La faute au cerveau –
« Notre oeil voit des images, des objets, que notre cerveau va interpréter grâce à ses expériences passées, à des indices contextuels ou à des mécanismes de correction … il va alors parfois générer une image différente de ce qui a été vu », explique Baptiste Bureau.
Face au « mur du café », des rangées de carreaux noirs et blancs décalées, le visiteur voit des lignes courbes alors qu’elles sont parfaitement droites et parallèles entre elles. « L’illusion est créée par la bande grise présente entre les rangées », explique le chef du projet.
« Par moment, on associe le gris au blanc et donc on élargit le carré blanc, à d’autre, on associe le gris au noir et on élargit le noir, ce qui crée une sensation de déformation ».
Autre expérience troublante: des carrés que l’on perçoit de gris différents s’avèrent d’une teinte parfaitement identique. « Tout est lié à l’environnement: un carré entouré de couleurs sombres sera perçu plus clair qu’il ne l’est et inversement ».
Dans la chambre d?Ames, un classique des illusions, les visiteurs auront l’impression de grandir ou de rétrécir. Un peu plus loin, deux tables différentes sont dessinées côte à côte: rectificatif en positionnant un cache sur les deux éléments, on se rend compte qu’elles sont de tailles et de formes identiques.
– pas tous égaux –
« Certaines illusions fonctionneront avec certains individus et pas avec d’autres », note M. Bureau. Pour interpréter ce que nos yeux voient, nous utilisons beaucoup nos expériences passées. Or elles diffèrent d’un individu à l’autre, d’un âge à l’autre.
Les serpents « tournants » du Japonais Akiyoshi Kitaoka, une illusion de mouvement due notamment à la fatigue des photorécepteurs, tournent plus ou moins selon les observateurs.
Face à des taches noires positionnées n’importe comment, certains verront apparaître un dalmatien plus rapidement que d’autres.
Notre cerveau a besoin de trouver un sens à ce qu’il observe quitte à l’inventer.
« Tout cela se fait de manière inconsciente, on est totalement impuissant face à ces mécanismes », explique Baptiste Bureau.
Et même après avoir réalisé l’imposture, on ne peut pas lutter: les couleurs restent là ou il n’y en a pas, les visages continuent de disparaître, les motifs fixes dansent toujours…
– Pas uniquement visuelles –
La vue, l?ouïe, l?odorat, le goût, le toucher mais aussi la proprioception (la sensibilité des os, des muscles …), la douleur… « Pour chacun de ces sens il y a des illusions », note le chef de projet.
En caressant une grille, le visiteur aura rapidement la sensation de toucher du velours. « Ce type d’illusions est aujourd’hui utilisé en réalité virtuelle pour tenter d’accompagner les jeux vidéo d’une perception sensorielle ».
Après avoir positionné ses mains sur deux plaques, une chaude et une froide, le visiteur place ses deux mains sur une troisième plaque: surprise, la main droite vous dit que la plaque est chaude quand la gauche dit qu’elle est froide.
« Il y a un phénomène d’habituation des récepteurs de la main, un peu comme un marin qui passe quelques mois en mer et qui, de retour sur terre, a la sensation qu’elle bouge », s’amuse Baptiste Bureau.
– Toujours mystérieuses –
Même si certaines illusions ont plus de cent ans, le sujet reste d’actualité: des recherches sont toujours en cours pour les comprendre.
Une illusion découverte par un psychologue allemand il y a plus de 120 ans, « la grille d’Erman (nous voyons du gris entre des carrés noirs, là où il n’y en a pas), reste encore aujourd’hui controversée », ajoute-t-il.
Elles soulèvent des questions scientifiques très profondes en psychologie, en sciences cognitives… Car il est finalement question de savoir comment nous interprétons et concevons le monde.
L’exposition est visible jusqu’au 25 août 2019.