Victimes de viols, ces bénévoles se rendent à la sortie des écoles pour prévenir les violences sexuelles sur les jeunes filles et venir en aide aux victimes.
Elles font partie d’un réseau national de plus de 21 000 bénévoles appelé le RENATA (Réseau National des Associations de Tantines) et se surnomment « l’armée des tantines ». Armées de tracts et préservatifs féminins, elles arpentent les rues du Cameroun depuis 12 ans pour instruire les jeunes et faire de la prévention autour des abus sexuels, de la violence et des grossesses précoces.
Ces femmes, pour la plupart elles-mêmes victimes de violences sexuelles, viennent également en aide aux victimes qui n’osent pas se défendre ou même en parler car ces abus se passent souvent en famille. « Très souvent la famille va jusqu’à faire des arrangements à l’amiable avec les violeurs sans l’avis de la victime. Très souvent la victime est vraiment abandonnée à elle-même » déplore Charnelle Lumière, membre de RENATA au micro d’Euronews. Elle même est une mère célibataire et victime de multiples viols dans sa jeunesse par son frère puis son oncle. Les « tantines » les aident en partie à reconstruire leur vie et regagner une confiance perdue.
Face au nombre important de viols au Cameroun dans la sphère familiale et l’entourage, le Réseau National des Associations de Tantines compte bien prendre le problème à bras le corps et commencer la sensibilisation très tôt. Les nouvelles « tantines » interviennent d’abord dans leur famille, dans leur village puis dans leur quartier. Mais RENATA intervient également dans les écoles en proposant des programmes de sensibilisation destinés aux enfants de 4 à 5 ans et aux adolescents car selon une de leurs études, 10% des 5,2% de victimes au Cameroun auraient été violées avant l’âge de 10 ans.
Condamner toutes les violences faites aux femmes
La vocation du Réseau National des Associations de Tantines n’est pas seulement de punir et condamner les viols, mais également toutes les pratiques ancrées dans les traditions qui nuisent le plus souvent aux femmes comme le repassage des seins, qui touche une jeune fille sur quatre au Cameroun. Une coutume pratiquée sur les jeunes filles par les tantes ou les grand-mères à l’aide d’un objet brûlant que l’on appuie sur la poitrine pour aplatir les seins et éviter leur développement.
« Le gouvernement doit vraiment faire des lois et être cohérent dans la punition des personnes qui continuent à commettre ces actes, a déclaré Flavien Nkondo, co-fondateur de RENATA au micro d’AfricaNews. Donnez-leur – aux organisations comme RENATA, ndlr – les moyens de continuer à conseiller dans les communautés, à continuer la sensibilisation, le suivi des victimes et les soins aux victimes et le plus tôt. »
Avec leurs diverses actions, l’armée des tantines brise le silence autour de ces pratiques destructrices, autant sur le plan physique que moral, en attendant une reconnaissance internationale de ces crimes.
Les tantines en crise
Bien que RENATA a été fondé par un groupe allemand, l’association recevait de nombreuses donations internationales, mais surtout américaines. Depuis l’arrivée de Donald Trump à la présidence américaine, elle est menacée par le « Global Gag Rule », un décret qui interdit le financement par les États-Unis d’organisations qui proposent des services d’avortement légal et délivrent une information complète en matière de santé sexuelle et reproductive. Mais les tantines ne comptent pas en rester là et trouveront d’autres financements pour continuer leur combat.